EXCERPTS
Après avoir fait le constat que le développement des services de garde éducatifs à l’enfance « ne fonctionne plus », le gouvernement Legault cherche « un remède de cheval ». Il lancera d’avril à juin des consultations et promet de déposer à l’automne un projet de loi et un livre blanc qui entameront « la plus importante réforme depuis la création du réseau ».
« Ça sera une démarche qui va être rigoureuse, mais une démarche que je souhaite aussi terre à terre. On ne va pas là pour pelleter des nuages. On veut que ça débouche sur des résultats », a affirmé le ministre de la Famille, Mathieu Lacombe, en entrevue éditoriale avec La Presse.
Alors que « les Québécois qui attendent une place pour leurs enfants voient que le système ne fonctionne pas [et que] les gens dans le réseau voient qu’on n’arrive pas à le développer aussi rapidement qu’on le devrait », Mathieu Lacombe estime qu’il est temps d’entreprendre « des changements qui seront importants ». Ce dernier a été critiqué ces derniers jours pour avoir constaté les limites du système actuel, sans toutefois proposer de solutions.
Quel chantier souhaite-t-il mettre en priorité ? Le ministre se montre prudent, promettant tout de même que le livre blanc qu’il déposera cet automne, près d’un an avant les prochaines élections, « viendra expliquer et définir la position [du] gouvernement quant à l’avenir des services de garde éducatifs à l’enfance ».
Ultimement, il faut tendre vers un réseau qui sera un jour 100 % subventionné.
- Mathieu Lacombe, ministre de la Famille
Au cabinet du ministre Lacombe, on estime que la conversion des places non subventionnées en places subventionnées coûterait à l’État entre 300 millions et 1 milliard supplémentaires récurrents, selon les scénarios.
Par où commencer ?
Le ministre de la Famille dit haut et fort qu’il croit au modèle des centres de la petite enfance (CPE). Il ajoute tout de même qu’il ne partira pas « en guerre contre les garderies privées », dont le nombre a « explosé » de 536 % entre 2010 et 2018, affirme-t-il.
« C’est un choix politique avec lequel je ne suis pas d’accord, mais ça résulte d’un choix et d’une vision des gouvernements libéraux qui étaient là. […] [Les garderies privées] sont là et elles n’ont rien volé à personne. Elles existent parce que les précédents gouvernements leur ont permis d’être là et il faut respecter ça », explique-t-il.
Maintenant, il faut faire en sorte que le réseau soit beaucoup plus solide et que les parents qui cherchent une place en trouvent une.
Mathieu Lacombe, ministre de la Famille
La semaine dernière, Mathieu Lacombe reconnaissait à Radio-Canada que 10 000 des 15 000 nouvelles places annoncées en CPE depuis deux ans connaissaient des retards dans leur mise en œuvre. De ce nombre, le ministre affirme à La Presse qu’il sera en mesure d’en concrétiser de 6000 à 7000 cette année, alors que 51 073 enfants patientaient toujours en 2020 au Guichet unique d’accès aux places en services de garde reconnus.
Le ministre de la Famille estime aussi que « les parents ont perdu confiance [dans ce guichet unique], la Place 0-5, [et qu’ils] ont l’impression que leur rang de priorité n’est pas respecté, entre autres parce que les critères d’admission sont définis par chaque CPE de façon excessivement variable ».
« Ça n’a aucun bon sens. On parle de places qui sont financées par l’ensemble des contribuables. On se doit d’assurer une équité dans le traitement des demandes. On doit s’assurer que les parents ont tous une chance égale d’avoir accès à ces places-là », affirme M. Lacombe, qui ouvre la porte à ce que « ces politiques d’admission [puissent] être approuvées par le ministère de la Famille ».
Simplifier la bureaucratie
En parallèle, le ministre de la Famille promet de simplifier à nouveau les nombreuses étapes à réaliser (il y en a 17) afin d’ouvrir des places en CPE. Le gouvernement avait déjà assoupli ses règles à l’hiver 2019 pour permettre aux OBNL responsables de ces garderies d’attribuer plus rapidement, dans un délai de 24 mois, les nouvelles places confirmées par Québec. Cette démarche s’inscrit dans le contexte où des garderies en milieu familial ont fermé depuis le début de la pandémie, ce qui met une pression supplémentaire sur le réseau.
On va alléger ce qu’on peut alléger, mais surtout, on va se mettre en mode urgence pour concrétiser les places déjà annoncées […] pour que ça sorte le plus rapidement possible.
Mathieu Lacombe, ministre de la Famille
Le ministre de la Famille assure également que des mesures fiscales devraient être inscrites dans le prochain budget du ministre des Finances, Eric Girard, pour « freiner l’hémorragie dans le milieu familial ». Depuis 2015, la décroissance du nombre de responsables de services de garde et des places offertes en milieu familial s’accélère, note-t-il.
« On a une tempête parfaite. On a perdu [au cours de la dernière année] des places en milieu familial de façon marquée, plus que les années passées, [alors que] le développement ne se fait pas assez rapidement à mon goût [dans le réseau reconnu] », explique M. Lacombe.
« C’est important qu’on mette des mesures en place pour être plus intéressants auprès du réseau familial, pour qu’on arrête de perdre des places là alors qu’on essaie d’en créer de l’autre côté », ajoute-t-il.